Editorial – Volume 5 – Numéro 4
Chers Collègues,
Des nouvelles fraîches du congrès SITC 2021 : le TMB, un biomarqueur pour certains cancers mais pas pour tous, et encore des ajustements à faire en immunothérapie antitumorale. Au delà de l’émotion perceptible de la salle lorsque Ugur Sahin et Ozlem Tureci ont reçu le Gold Award de la société d’immunothérapie des cancers (SITC) pour leurs travaux sur les vaccins à ARN qui ont permis de sauver des millions de vies de la Covid-19, je retiens deux points essentiels du 36e congrès annuel du SITC 2021 qui s’est tenu au mois de novembre à Washington et en virtuel.
Le premier concerne la valeur du Tumor Mutational Burden (TMB) comme biomarqueur prédictif de la réponse aux inhibiteurs de points de contrôle immunitaires (ICI). Luc T.G. Morris (Memorial Sloan Kettering Cancer Center, New York) a présenté lors d’une session dédiée au TMB des données convaincantes, issues des articles récents de Cristina Valero-Mayor concernant la valeur pronostique et prédictive de ce marqueur, obtenues à partir de 1 678 patients (Nature Genetics 2021 et JAMA Oncol 2021) et les a comparées à celles de la cohorte de 102 patients qui a permis d’obtenir l’autorisation de la Food and Drug Administration (FDA) en juin 2020 pour utiliser le pembrolizumab pour des adultes et des enfants ayant un TMB élevé. Il apparaît que le TMB n’a de valeur pronostique universelle que si on utilise des cut-off s optimaux pour chaque type de cancer. Ainsi, la valeur de TMB ≥ 10 classiquement recommandée ne peut être utilisée pour prédire la réponse dans la totalité des cancers. Des modèles intégratifs pour la prédiction de réponse sont en cours d’étude (Chowell et al., Nature Biotechnology, 2021). Daniel J. McGrail du MD Anderson à Houston a apporté un éclairage fonctionnel à l’échec du TMB universel. Une analyse des données de 35 cohortes de patients traités par ICI correspondant au total à 15 100 patients fait émerger un schéma selon lequel un fort TMB n’est pas toujours associé à une forte infiltration immunitaire CD8. Il existe 2 groupes cancers : les cancers de catégorie I (utérus, côlon, poumon, vessie, mélanome) pour lesquels les valeurs de TMB corrèlent avec les CD8 et où le TMB a une valeur prédictive forte et robuste, et les cancers de catégorie II sans corrélation significative entre le TMB et les CD8 (sein, prostate, rein, glioblastome) et ceci quelle que soit la valeur du cut-off utilisée pour le TMB (McGrail et al., Annals Oncol, 2021). Ces cancers de catégorie II ne sont pas moins répondeurs à l’immunothérapie que les cancers de catégorie I, suggérant que différents mécanismes sont impliqués dans la réponse à l’immunothérapie dans ces deux groupes de patients. Le TMB est mesuré par analyse différentielle des données de séquence exomique de l’ADN de la tumeur et du tissu sain. Il intègre de nombreux paramètres qui dépendent de la pureté des échantillons utilisés, du séquençage à la fois des régions codantes et non codantes, de l’identification des mutations silencieuses et non silencieuses. Ces nombreux paramètres qui peuvent affecter la mesure du TMB rendent son extension en routine difficile aujourd’hui.