Les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire en oncologie : quelle place pour les posologies alternatives ?

Les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire (immune checkpoint inhibitors ou ICI) ont révolutionné le traitement de nombreux cancers autrefois difficilement curables tels certains lymphomes, mais essentiellement de tumeurs solides tels le mélanome métastatique, le cancer du poumon non à petites cellules, les cancers ORL ou encore le cancer du rein. Les ICIs (anti-CTLA-4, anti-PD-1 ou anti-PD-L1) ont tous été initialement développés et sont arrivés sur le marché avec une posologie initialement exprimée en mg/kg, avant de basculer sur un schéma de traitement dit en flat-dose ou dose unique. La dose unique repose sur le postulat que tous les patients atteints de cancer pèsent entre 80 et 100 kg, et qu’augmenter la posologie permet d’augmenter géométriquement l’intervalle entre deux administrations.

Editorial

Chers collègues,
Avec son programme exceptionnellement riche d’informations, de synthèses et de débats sur l’immuno-oncologie moderne, les 7es Journées Scientifiques Immunité & Cancer (JSIC) furent un succès d’audience digitale avec plus de 1 200 participants, montrant l’intérêt que suscite ce rendez-vous annuel parmi la communauté médicale et scientifique.
La mise au point présente les actualités en immunothérapie présentées lors des JSIC. Elle montre que la place des ICI (immune checkpoint inhibitors) dans les tumeurs solides est désormais clairement établie dans de nombreuses localisations tumorales (à l’exception de l’ovaire et du cerveau) ainsi que dans les hémopathies malignes où le pembrolizumab suivi de la chimiothérapie fait son entrée en 1re ligne dans les lymphomes…

Indications et place des immunothérapies dans la stratégie thérapeutique des cancers en 2022

Depuis quelques années, l’immunothérapie occupe une place de plus en plus importante dans les stratégies thérapeutiques en oncologie et en oncohématologie. Elle se positionne aujourd’hui comme un standard de traitement dans les cancers digestifs, gynécologiques, du sein, cutanés, de la sphère ORL, thoraciques, génito-urinaires, ainsi que dans certaines hémopathies malignes. À travers les actualités de cette année 2022, la révolution de l’immunothérapie en oncologie solide persiste et signe, avec une remontée des lignes dans plusieurs algorithmes de traitement, qui remettent même en cause la chirurgie dans certaines situations. De même, dans les hémopathies malignes, les approches d’immunothérapie (CAR T-cells et anticorps bispécifiques) confirment leur place aux stades avancés dans le lymphome et le myélome multiple et montrent des résultats positifs, plus ou moins matures, dans les lignes antérieures de traitement. En revanche, l’immunothérapie n’a pas encore trouvé sa place dans les cancers de l’ovaire ou les glioblastomes, avec dans ces derniers un avenir qui se dessine avec des approches vaccinales antigènes-spécifiques. Aujourd’hui, plusieurs essais sont en cours afin de sélectionner les patients qui bénéficieraient d’une meilleure prise en charge et d’enrichir l’arsenal thérapeutique de ces différentes tumeurs.

L’immunothérapie dans le traitement des cancers du sein

L’échappement immunitaire est une caractéristique clé du cancer et les traitements qui visent à moduler ou réactiver la réponse immunitaire innée et spécifique sont en plein essor depuis l’avènement des inhibiteurs de points de contrôle immunitaires (ICI). Les stratégies thérapeutiques d’immunothérapie sont diverses : association des inhibiteurs de points de contrôle à une chimiothérapie, anticorps bispécifiques, transfert adoptif de cellules, vaccins peptidiques, etc. Dans le traitement des cancers du sein, le pembrolizumab, un anticorps anti-PD-1 est désormais considéré comme un standard de traitement des cancers du sein triple négatifs métastatiques et localisés, en association à une chimiothérapie. Cette association a montré un bénéfice en survie globale dans le traitement des patientes atteintes de cancer du sein métastatique et une amélioration de la réponse complète histologique et de la survie sans événements en situation néoadjuvante et adjuvante. L’expression de PD-L1 est le biomarqueur prédictif de réponse aux ICI le plus utilisé dans le cancer du sein du fait d’autorisations de mise sur le marché conditionnées à ces tests. De nombreux autres biomarqueurs tantôt pronostiques ou prédictifs existent et méritent d’être considérés. L’environnement tumoral immunitaire des cancers du sein est hétérogène et les cancers du sein exprimant les récepteurs aux œstrogènes sont les moins à même de répondre aux ICI et à l’immunothérapie. Des essais thérapeutiques associant les ICPI à des anticorps anti-HER2, des inhibiteurs de PARP ou des ADC sont en cours. Les toxicités immuno-induites peuvent être irréversibles et méritent une attention particulière à l’avenir. Elles sont à même de nuancer le bénéfice de cette classe de médicaments, notamment en situation néoadjuvante et adjuvante.

Cancer urothélial métastatique et immunothérapie : changement d’histoire naturelle et approche multidisciplinaire

La prise en charge des carcinomes urothéliaux métastatiques s’est modifiée ces dernières années avec l’arrivée de l’immunothérapie de maintenance par avelumab chez les patients non progressifs sous 1re ligne de traitement à base de sels de platine. L’étude de phase III randomisée JAVELIN Bladder 100 a montré un bénéfice en survie globale de cette stratégie de maintenance avec approximativement 1/3 des patients encore sous traitement après 1 an d’avelumab. Cette amélioration de la survie de nos patients a modifié l’histoire naturelle des carcinomes urothéliaux comme cela a été le cas d’autres types tumoraux. De nombreuses questions restent sans réponse concernant la 1re ligne de chimiothérapie et le traitement de maintenance : quel nombre de cycles optimal de chimiothérapie, le type de chimiothérapie ou encore l’intervalle entre la fi n de chimiothérapie et l’initiation du traitement de maintenance, la durée de la maintenance ? De nouvelles questions émergent du fait de l’amélioration de la survie de nos patients. Nous rapportons le cas d’un patient traité en 1re ligne par une chimiothérapie de type MVAC-intensif pour un carcinome urothélial métastatique d’emblée. Après une réponse complète selon RECIST 1.1 nous avons initié le traitement de maintenance par avelumab. Après une persistance de la réponse complète systémique, le patient développe une récidive locale sous forme de tumeur de vessie non infiltrant le muscle (TVNIM). La récidive de la tumeur primitive sous forme de TVNIM soulève la question de la prise en charge : cystectomie radicale versus BCG thérapie versus changement de ligne thérapeutique ? Pour quel patient et quand ? Par ailleurs ce cas illustre la nécessité d’une surveillance de la vessie par nos collègues urologues lorsque celle-ci est toujours en place. La prise en charge des récidives locales relève d’une approche pluridisciplinaire et remet nos collègues urologues et/ou radiothérapeutes au centre de la prise en charge de nos patients métastatiques qui jusqu’alors étaient quasi exclusivement suivis par les oncologues médicaux.

Ferroptose des neutrophiles dans le cancer, une nouvelle voie à contrôler ?

La ferroptose, processus de mort cellulaire découvert ces dernières années, représente aujourd’hui une voie d’intérêt majeur pour la communauté scientifique. Celle-ci est en effet associée à de nombreuses maladies telles que les maladies du sang et du système nerveux central, les lésions rénales ou d’ischémie-reperfusion ainsi que les cancers (1,2). Ce processus de mort cellulaire repose sur des perturbations oxydatives intracellulaires qui se produisent en présence de fer et conduisent à une peroxydation massive des phospholipides polyinsaturés.

CAR T-cells et leucémie aigüe myéloïde : 2e round ! Résultats du congrès de l’ASH 2022

Cette dernière décennie a marqué le début de l’ère des lymphocytes T génétiquement modifiés, plus particulièrement les CAR T-cells, qui ont profondément modifié la prise en charge de certaines hémopathies telles que le lymphome agressif, le myélome multiple ou la leucémie aiguë lymphoblastique. Dans les lymphomes B diffus à grandes cellules ou la leucémie aiguë lymphoblastique, ces derniers sont rentrés dans le soin courant avec des autorisations de mise sur le marché (AMM) qui leur sont propres. Malheureusement, l’épopée des CAR T-cells dans la leucémie aiguë myéloïde (LAM) n’est pour le moment pas encore arrivée.

Le complément entre en piste comme biomarqueur et cible thérapeutique dans le cancer

Le système du complément est un bras puissant de l’immunité innée qui constitue notre première ligne de défense contre les agents pathogènes. En outre, le complément joue un rôle important dans le maintien de l’homéostasie de l’hôte. Ici, nous présentons le rôle du complément dans le cancer et décrivons ses fonctions fortement dépendantes du contexte. Nous nous concentrons sur le complément en tant qu’acteur dans le carcinome rénal à cellules claires et le cancer du poumon, en soulignant son potentiel en tant que biomarqueur, mais aussi ses nouvelles fonctions, spécifiquement impliquées dans chaque type de cancer. Enfin, nous donnons un aperçu des essais cliniques en cours pour l’inhibition ou l’activation du complément dans le traitement du cancer.