Editorial

Cher(e)s collègues,
C’est avec plaisir que je vous présente ce nouveau numéro de LA REVUE Immunité & Cancer, et vous ne serez pas déçus. Par son côté transversal et la richesse de son contenu, le dossier thématique (David Tougeron, Frédéric Bibeau, Amina Larbi, Atanas Pachev, Franck Monnien, Alexis Overs, Chloé Molimard, Thomas Aparicio) sur les nouvelles pistes de traitement par immunothérapie dans les cancers digestifs va être d’un grand intérêt pour les cliniciens. Vous y serez informés des résultats extrêmement encourageants des essais néoadjuvants. Le dossier dresse la liste des autorisations de mise sur le marché (AMM) avec remboursement en France, la liste des résultats des différents essais d’immunothérapie en cours, et discute les résultats selon les localisations. Il présente aussi une mise à jour des critères histologiques de sélection des patients et des critères radiologiques de réponse, en particulier dans les essais néoadjuvants

Pathologie numérique et intelligence artificielle à l’ère de la médecine de précision

La pathologie a récemment pris le tournant de la révolution numérique notamment avec l’avènement de scanners de lames de tissu très performants. Comme sa consœur du monde de la radiologie, cette source d’imagerie permet aux algorithmes notamment d’intelligence artificielle (IA) d’explorer à grande échelle ces données très riches d’un point de vue biologique et clinique. La révolution de l’intelligence artificielle de la dernière décennie accompagne donc celle des services d’histopathologie au service de la médecine de précision dans le domaine de l’oncologie. Cet article propose une introduction à la fois des concepts propres à l’IA et de ses applications en pathologie numérique pour le diagnostic, le pronostic et à la stratification des patients susceptibles de répondre positivement à certains traitements, avec comme objectif la mise au point de tests compagnons in silico. Certains des travaux présentés sont le fruit de plusieurs années de collaboration entre nos différentes équipes, dans une approche interdisciplinaire combinant la vision par ordinateur, l’IA et de la médecine.

Cancers digestifs, les nouvelles pistes

Les traitements par inhibiteurs de point de contrôle immunitaire (ICI) ont récemment montré leur efficacité dans le traitement de nombreux cancers digestifs. Des autorisations de mise sur le marché (AMM) européennes ont été obtenues pour le traitement des cancers de l’œsophage, de l’estomac, des voies biliaires, colorectaux dMMR/MSI et des carcinomes hépatocellulaires. Les cancers dMMR/MSI ont une grande sensibilité aux ICI, pour les autres il existe une variabilité de réponse aux ICI. Dans certaines localisations les AMM sont restreintes à l’expression de PD-L1 selon des seuils variables. D’autres facteurs prédictifs d’efficacité restent à identifier. L’évaluation de la réponse tumorale est parfois complexe et la mise en évidence d’une réponse complète dans certaines tumeurs est importante pour décider un arrêt de traitement puis une surveillance. Les perspectives à court terme sont l’arrivée de l’immunothérapie en situation néoadjuvante/péri-opératoire de différentes tumeurs digestives. Enfin, de nouvelles combinaisons d’immunothérapie ou avec d’autres traitements sont à l’étude dans le traitement des cancers réfractaires aux ICI notamment les adénocarcinomes colorectaux pMMR/MSS et les adénocarcinomes du pancréas.

Cancer bronchique à petites cellules diffus : des longs survivants grâce à l’immunothérapie

Le cancer bronchique à petites cellules (CBPC) est relativement rare mais reste une pathologie difficile à traiter. Pendant plus de vingt ans, le standard de traitement de première ligne des formes étendues n’a pas évolué et était constitué d’une association de sels de platine et d’étoposide. L’arrivée des inhibiteurs de points de contrôle immunitaires a fait évoluer le cours de la maladie en venant s’associer au doublet de chimiothérapie et laisse entrevoir la possibilité d’obtenir des survies prolongées pour ce type histologique de pronostic particulièrement sombre. Les patients qui tirent un bénéfice majeur de l’immunothérapie sont néanmoins minoritaires et l’enjeu des dernières publications basées sur les essais princeps est de tenter d’identifier les facteurs cliniques ou biologiques pouvant permettre de sélectionner au mieux les patients. Il est possible également que les CBPC constituent une entité hétérogène, que l’on pourrait classer en sous-types en fonction de leurs caractéristiques moléculaires et de leurs réponses aux différents traitements. Nous rapportons ici l’exemple d’un patient ayant un CBPC étendu, traité par immunothérapie, qui a bénéficié d’une survie de plus de 3 ans.

Une place indiscutable pour l’immunothérapie en 1re ligne des cancers du col de l’utérus

JUSTIFICATIF ET OBJECTIFS
Jusqu’à présent, la chimiothérapie à base de platine restait le standard de traitement des cancers du col de l’utérus persistants/ récidivants ou métastatiques, le protocole platine + paclitaxel + bévacizumab ayant montré un gain de survie de 17,5 mois dans l’étude pivotale GOG 240 (1). Récemment, le pembrolizumab en monothérapie a montré une certaine efficacité chez les patientes déjà prétraitées et présentant une tumeur exprimant PD-L1 dans l’étude de phase II KEYNOTE-158, avec 14,3 % de taux de réponse globale après au moins 1 ligne antérieure de chimiothérapie (2).

Les CAR T-cells constituent un traitement efficace des lymphomes cérébraux primitifs en rechute

JUSTIFICATIFS ET OBJECTIFS

Les lymphomes primitifs du système nerveux central (LPSNC) sont des hémopathies rares. Dans plus de 90 % des cas, ce sont des lymphomes B diffus à grandes cellules. Le pronostic de la maladie reste très sévère, notamment en raison d’un risque de rechute élevé. La médiane de survie à la rechute est de l’ordre de 6 mois, sauf pour les patients, minoritaires, qui peuvent bénéficier d’une chimiothérapie intensive avec autogreffe de cellules souches hématopoïétiques (1).

Hétérogénéité et impact en cancérologie des checkpoints immuns solubles

La généralisation des immunothérapies dans le traitement des cancers ces dernières années a permis de relancer l’engouement des cliniciens et chercheurs sur le rôle du système immunitaire dans la défense antitumorale, notamment dans la recherche de biomarqueurs immuns pronostics ou prédictifs de réponse. L’analyse de checkpoints immuns solubles permet d’une part une meilleure stratification des patients, avec à terme l’idée d’améliorer la prise en charge des patients, et d’autre part améliore les connaissances sur la place des différents acteurs immuns dans la lutte antitumorale. Cependant, l’analyse des checkpoints immuns solubles montre une grande hétérogénéité des mécanismes de production ainsi que des formes solubles, libres ou associées à des vésicules extracellulaires. Ces variations pouvant avoir des conséquences différentes sur les acteurs impliqués, il est nécessaire d’approfondir la caractérisation des checkpoints solubles dès qu’ils semblent présenter un intérêt particulier dans une pathologie donnée.