Editorial

Cher(e)s collègues,
Le cancer hépatocellulaire présente un microenvironnement tumoral peu favorable sur le plan de la réponse immunitaire, comme l’atteste l’inhibition de la maturation des structures lymphoïdes tertiaires qui permettent l’activation immunitaire locale et abritent les cellules T progénitrices cibles des anti-ICI. Le dossier thématique de ce numéro présente une revue détaillée sur les traitements immunomodulateurs actuels du cancer hépatocellulaire, cancer auquel nous n’avons consacré que peu d’articles jusqu’à présent. Bien que les anti-ICI aient amélioré la survie globale des patients de manière significative par rapport aux anti-angiogéniques, la proportion de répondeurs reste faible, suggérant la nécessité de les combiner avec d’autres modulateurs du microenvironnement tumoral. Vous trouverez les résultats actuels de leur utilisation en préclinique/clinique en combinaison avec des anti-angiogéniques et y apprendrez que leur administration par voie locorégionale semble favoriser l’induction de lymphocytes T CD8 cytotoxiques. Enfin, la consultation de la longue liste des essais de leur combinaison à des vaccins à ADN ou à ARN laisse prévoir une actualité à suivre dans le domaine (cf. Dossier thématique, Carole Fournier, Zuzana Macek Jilkova, Patrice N Marche, Julien Ghelfi , Thomas Decaens).

Enjeux actuels autour des thérapies combinées de carcinome hépatocellulaire : immunomodulations et vaccins

Le cancer du foie, dont le carcinome hépatocellulaire (CHC) représente 80 % des cas de cancer primitif, est l’une des causes les plus courantes de décès liés au cancer avec une incidence en constante augmentation. L’absence de traitement efficace et les difficultés de diagnostic précoce en font un cancer de mauvais pronostic par le plan stratégique national décennal de lutte contre le cancer (survie nette standardisée à 5 ans de seulement 18 %). Bien que les immunothérapies aient amélioré la survie globale des patients atteints de CHC de manière significative par rapport au sorafénib, la proportion de répondeurs reste faible. Dans cette revue, nous présenterons les différentes combinaisons thérapeutiques conduisant à des immunomodulations favorables à l’amélioration des traitements du CHC en préclinique et en clinique. Plus précisément, les approches combinatoires incluant les thérapies locorégionales ou la vaccination en association avec notamment les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire seront détaillées.

Cancer bronchique non à petites cellules : la place de l’immunothérapie chez le sujet âgé

Si l’arrivée de l’immunothérapie dans la prise en charge du cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) avancé ou métastatique a permis d’en améliorer significativement la survie globale comme la survie sans progression, le bénéfice chez les patients âgés est moins évident. En effet, le concept d’immunosénescence aurait tendance à décourager l’utilisation des inhibiteurs de point de contrôle immunitaire (ICI) dans cette population. Pourtant, les analyses en sous-groupes dans les études princeps semblent montrer qu’une partie des sujets âgés bénéficient quand même de ce traitement. Le statut PD-L1 est actuellement le seul biomarqueur prédictif reconnu en pratique clinique mais, outre ses limites en termes de prédiction de l’efficacité de l’immunothérapie, il est incapable de prédire le risque d’hyper-progression ou de survenue d’événements indésirables immuno-induits. Avec le vieillissement évident de la population et l’augmentation de l’incidence du CBNPC dans la population générale, l’enjeu des récentes études est donc d’identifier les patients âgés chez qui l’immunothérapie est la plus à même de fonctionner avec un risque de toxicité moindre. L’immunosénescence et ses marqueurs pourraient renfermer la clé de cette identification. Nous rapportons ici l’exemple d’un patient de plus de 70 ans traité par ICI en monothérapie pour un CBNPC métastatique et qui a présenté une hépatite auto-immune de grade 3.

Les CAR T-cells anti-CD19 sont un traitement d’une grande efficacité pour les patients atteints de macroglobulinémie de Waldenström transformée

JUSTIFICATIFS ET OBJECTIFS
La transformation histologique (TH) de la macroglobulinémie de Waldenström (MW)/lymphome lymphoplasmocytaire est un événement rare mais grave survenant dans moins de 5 % des cas. Les patients présentent généralement des caractéristiques pronostiques défavorables, telles qu’une atteinte extranodale et des taux élevés de lactate déshydrogénase notamment. Ces patients ont un pronostic défavorable après les traitements standards, avec une maladie fréquemment réfractaire, une durée de réponse courte et/ou des rechutes atteignant le système nerveux central (SNC) (1). La survie globale (SG) médiane de ces patients est comprise entre 1,5 et 2,7 ans. Les lymphocytes T à récepteur antigénique chimérique (CAR-T) ont été autorisés pour le traitement des lymphomes B agressifs, y compris le lymphome B à grandes cellules de novo et le lymphome folliculaire transformé. Cependant, peu de données sont disponibles sur l’efficacité des CAR-T chez les patients atteints de MW transformée (t-MW). De rares cas ont été rapportés dans la littérature, dont 2 cas de l’étude TRANSCEND (1 réponse
partielle [RP]) (2) et 1 cas rapporté par Bansal et al. en réponse complète avec un suivi de 1 an (3). Cette étude collaborative a été menée afi n d’évaluer l’efficacité et la tolérance des CAR-T chez les patients atteints de t-MW

TRANSCEND FL : premiers résultats du lisocabtagene maraleucel en deuxième ligne de traitement chez les patients atteints de lymphome folliculaire de haut risque en rechute ou réfractaire

JUSTIFICATIFS ET OBJECTIFS
Les lymphomes folliculaires (LF) représentent un peu plus de 3 000 nouveaux cas chaque année en France (10 à 15 % des hémopathies lymphoïdes nouvellement diagnostiquées) (1), et sont caractérisés par une évolution indolente et très hétérogène d’un patient à l’autre. En effet, le pronostic des patients qui rechutent dans les 24 mois (POD24) suivant l’immunochimiothérapie initiale (12 à 20 % des patients) reste sombre avec une survie globale à 5 ans de 73 % vs 95 % pour les patients rechutant plus tardivement (2). Au-delà de 3 lignes de traitement, la 1re cause de mortalité des patients est le lymphome avec une survie globale à 5 ans de 75 % (3). Les CAR T-cells (Chimeric antigenic receptor T cells) constituent une immunothérapie utilisant des lymphocytes T autologues génétiquement modifiés. Le développement des CAR-T anti-CD19 a été un des progrès thérapeutiques de ces dernières années dans la prise en charge des LF. L’axi-cel et le tisa-cel ont permis d’observer des réponses complètes (RC) chez 79 % et 69 % des patients atteints de LF traités après au moins 2 lignes thérapeutiques avec des réponses durables

Place des cellules dendritiques plasmacytoïdes en immunothérapie anticancéreuse

L’essor des immunothérapies au cours des dernières années a permis une amélioration considérable dans la prise en charge des cancers et la survie des patients. Ces traitements permettent de rétablir des réponses immunitaires fonctionnelles ou ciblées, en particulier avec l’utilisation des inhibiteurs de points de contrôle immunitaires ou des CAR T-cells. D’autres approches sont également à l’étude, comme les vaccins thérapeutiques utilisant les cellules dendritiques plasmacytoïdes afin de stimuler les réponses T spécifiques. Les études précliniques ont montré l’efficacité de ces cellules in vitro et trois études cliniques ont permis de montrer l’innocuité de ces traitements. La corrélation avec l’efficacité in vivo et la supériorité de cette approche reste à démontrer sur de plus larges études mais les vaccins thérapeutiques se positionnent néanmoins comme une approche prometteuse pour une utilisation synergique en combinaison avec les traitements actuels.