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Pathologie numérique et intelligence artificielle à l’ère de la médecine de précision

La pathologie a récemment pris le tournant de la révolution numérique notamment avec l’avènement de scanners de lames de tissu très performants. Comme sa consœur du monde de la radiologie, cette source d’imagerie permet aux algorithmes notamment d’intelligence artificielle (IA) d’explorer à grande échelle ces données très riches d’un point de vue biologique et clinique. La révolution de l’intelligence artificielle de la dernière décennie accompagne donc celle des services d’histopathologie au service de la médecine de précision dans le domaine de l’oncologie. Cet article propose une introduction à la fois des concepts propres à l’IA et de ses applications en pathologie numérique pour le diagnostic, le pronostic et à la stratification des patients susceptibles de répondre positivement à certains traitements, avec comme objectif la mise au point de tests compagnons in silico. Certains des travaux présentés sont le fruit de plusieurs années de collaboration entre nos différentes équipes, dans une approche interdisciplinaire combinant la vision par ordinateur, l’IA et de la médecine.

L’immunothérapie dans le traitement du carcinome hépatocellulaire

Le carcinome hépatocellulaire (CHC) est un des cancers les plus graves, en raison de l’incidence croissante d’une part et d’une mortalité élevée d’autre part, ceci étant d’autant plus vrai au stade avancé, i.e. avec envahissement porte et/ou métastases. Il n’a pendant longtemps pas bénéficié de traitement systémique efficace à l’instar du carcinome rénal à cellules claires. Une première avancée thérapeutique a eu lieu avec l’arrivée des thérapies ciblées il y a une quinzaine d’années, notamment le sorafenib, reflétant l’importance de la néoangiogenèse dans la carcinogenèse hépatique. Cependant, la véritable révolution, en termes de réponse tumorale et de pronostic, a vu le jour avec l’avènement des inhibiteurs de point de contrôle immunitaire (ICI) en 2020. Des réponses jusqu’alors jamais obtenues notamment dans le CHC avancé ont pu être observées, motivant la révision de la stratégie thérapeutique actuelle. Cependant, une partie des patients progressent d’emblée et la question de biomarqueurs prédictifs semble plus que jamais capitale pour une prise en charge optimale et personnalisée. Le but de cette revue est de faire le point complet sur la place de l’immunothérapie dans le CHC, et plus particulièrement dans le CHC avancé, tout en mettant en perspective les avancées dans la recherche sur les biomarqueurs dans l’optique de guider le choix thérapeutique.

Rupture de varices œsophagiennes chez un patient sous immunothérapie par atezolizumab/bevacizumab pour carcinome hépatocellulaire

Introduction. Depuis 2020, la thérapie combinée par atezolizumab/bevacizumab est le traitement de première ligne recommandé pour les carcinomes hépatocellulaires avancés. Le dépistage et la prise en charge prophylactique de l’hypertension portale endoscopique est primordiale devant le risque élevé d’hémorragie par hypertension portale.
Observation. Un homme âgé de 40 ans, connu pour une hépatite B, est adressé pour prise en charge d’un carcinome hépatocellulaire. L’imagerie montre une lésion infiltrante de 4 à 5 cm dans le segment VIII s’accompagnant d’un thrombus tumoral. Il est décidé de réaliser une hépatectomie droite avec résection endoluminale du thrombus portal et reconstruction portale. Quelques mois après, l’imagerie par résonance magnétique de contrôle confirme une récidive intrahépatique multifocale avec envahissement portal, avec une décision de traitement systémique par atezolizumab et bevacizumab. Une endoscopie œso-gastro-duodénale a été réalisée avant de débuter le traitement, qui montrait de larges varices œsophagiennes (VO) ; un traitement prophylactique associant la pose d’élastiques et l’introduction d’un traitement par bêta bloquants a été entrepris. Au 13e jour de la troisième cure d’immunothérapie, survient une hémorragie digestive par rupture de VO, nécessitant une nouvelle ligature de varices œsophagiennes. Le traitement par atezolizumab et bevacizumab est suspendu. Le contrôle morphologique montre une progression tumorale et la décision de changer le traitement systémique pour du sorafenib est prise.
Conclusion. L’association atezolizumab et bevacizumab a prouvé son efficacité et son profil favorable de tolérance dans le traitement du carcinome hépatocellulaire avancé. En cas de rupture de VO, l’arrêt du bevacizumab s’impose. La poursuite de l’atezolizumab seul peut être discuté versus une bascule vers les thérapies de seconde ligne.

Immunothérapie dans le carcinome hépatocellulaire

Le carcinome hépatocellulaire [CHC] est la première tumeur primitive du foie, c’est également le 6e cancer le plus fréquent au monde. Son incidence est en augmentation et son pronostic sombre avec 10-15 % de survie à 5 ans. Sa gravité tient aux caractéristiques de la tumeur elle-même et au terrain sur lequel elle se développe, la cirrhose, qui peut se compliquer d’hypertension portale et d’insuffisance hépatocellulaire. Les traitements à visée curative (radiofréquence, résection chirurgicale ou transplantation hépatique) sont ré­servés aux stades précoces de la maladie. En cas de CHC avancé, seul le sorafenib est validé en première ligne. À l’ère de l’immunothérapie et après échec de plusieurs inhibiteurs de tyrosine kinase, de nombreux essais étudiant des nouveaux traitements inhibiteurs des checkpoints immunitaires sont en cours, avec des résultats prometteurs. Nous rapportons le cas d’une patiente avec un CHC métastatique traité par nivolumab qui a présenté de nombreuses complications auto-immunes. Malgré la survenue d’une hépatite auto-im­mune, le nivolumab a pu être réintroduit sans récidive des symptômes hépatiques, permettant une réponse complète de la maladie.

Inhibition des points de contrôle du système immunitaire et carcinome hépatocellulaire: des premiers résultats prometteurs

Le carcinome hépatocellulaire (CHC) est une tumeur de mauvais pronostic, se développant essentiellement sur foie cirrhotique, et dont l’incidence augmente. Dans sa forme avancée, le traitement de référence repose sur un inhibiteur des tyrosines kinases, le sorafenib, qui confère un bénéfice de survie de 3 mois. Le développement de nouvelles approches thérapeutiques est essentiel pour améliorer la survie des patients. Le microenvironnement hépatique et les caractéristiques tumorales du CHC sont des éléments en faveur du développement de stratégies d’immunothérapie ciblant les points de contrôle du système immunitaire. Un essai de phase 2 a été publié et les phases 3 sont en cours utilisant des anticorps dirigés contre le récepteur Programmed Cell Death 1 (PD-1) ou son ligand (PD-L1). Nous rapportons ici le cas d’une patiente de 40 ans présentant un CHC sur foie non cirrhotique traité par sorafenib puis par nivolumab (anticorps anti-PD-1) permettant une stabilité radiologique précoce. Avec un taux rapporté de réponse objective de l’ordre de 20 %, l’immunothérapie du CHC ouvre des perspectives thérapeutiques prometteuses.