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Rechallenge par inhibiteurs de checkpoint après toxicités immuno-médiées

Les immunothérapies, et notamment les inhibiteurs des points de contrôle immunitaire, dont font partie les anti-PD-1 et anti-PD-L1, continuent d’apporter des preuves d’efficacité dans le traitement des cancers. Du fait de leur mécanisme d’action, elles exposent cependant les patients à des toxicités spécifiques immuno-médiées dans différents organes. Les plus fréquentes sont les éruptions cutanées, les pneumopathies et les colites. Il est décrit ici le cas d’un patient atteint d’un lymphome de Hodgkin, traité par anti-PD-1 et présentant une toxicité pulmonaire de grade 3 corticosensible. La résolution rapide et quasi-totale de la pneumopathie interstitielle a permis le rechallenge par anti-PD-1, jusqu’à une récidive de la toxicité immuno-médiée 6 mois plus tard. L’anti-PD-1 a alors été arrêté définitivement et le patient est aujourd’hui encore en réponse complète persistante.

Prise en charge des effets indésirables de l’immunothérapie des cancers

L’arrivée des nouvelles immunothérapies anti-CTLA-4 et anti-PD-1/PD-L1 constitue une réelle révolution en oncologie médicale. Tout d’abord, leur mécanisme d’action est un vrai changement de paradigme : au lieu de cibler la cellule tumorale elle-même, ces traitements cherchent à vaincre l’immunosuppression induite par la tumeur ou son microenvironnement. En levant les freins du système immunitaire, ces bloqueurs des points de contrôle du système immunitaire permettent d’induire des réponses antitumorales prolongées et d’augmenter la survie des patients. Ces nouvelles immunothérapies présentent également un profil de toxicité différent des traitements anticancéreux conventionnels, appelés effets indésirables liés à l’immunité [EILI]. Ils résultent de l’activation du système immunitaire contre les tissus normaux de l’organisme et peuvent être à l’origine de manifestations auto-immunes. Ce profil singulier de toxicité nous pousse à modifier nos pratiques cliniques : c’est l’objet de cette revue qui fera le point sur les différents effets indésirables et leur prise en charge.

Immunothérapies et cancers viro-induits

Les virus jouent un rôle majeur dans le développement de nombreuses pathologies, et notamment dans la genèse de certains cancers. Presque un cancer sur six peut être attribué à des agents pathogènes, comme des virus tels que les virus des hépatites B et C, le virus d’Epstein-Barr (EBV) ou l’herpès virus 8 (HHV-8). Par ailleurs, le risque de développer un cancer, en particulier vira-induit, après une transplantation d’organe et un traitement immunosuppressif nécessaire pour prévenir  le rejet  de greffe, ou chez un patient  infecté  par le VIH, est augmenté. Nous faisons le point sur les spécificités des cancers vira-induits sur le plan immunologique, et celui des  effets indésirables et de la prise en charge des patients. Les stratégies thérapeutiques de ces cancers, et en particulier la place des inhibiteurs de checkpoints seront discutés dans la  maladie  de  Kaposi  et le  carci­nome à cellules de Merkel, deux types de cancers de la peau viro-induits. Nous aborderons ensuite les mécanismes de cancérogénèse des lymphomes EBV-induits, ainsi que le développement des stratégies thérapeutiques innovantes liées au virus.

Quand le système immunitaire prend le dessus : immunothérapie, DRESS syndrome et cancer du sein triple-négatif

Le cancer du sein triple-négatif est un groupe hétérogène de tumeurs, généralement de mauvais pronostic. L’infiltration lymphocytaire intra-tumorale et l’expression de PD-L1 sont, entre autres, le rationnel pour l’utilisation de l’immunothérapie dans cette maladie en phase métastatique, notamment des inhibiteurs de PD-1 et PD-L1. Cependant, ces traitements ne sont pas dénués de toxicités, et il existe de nombreux cas de toxicités auto-immunes. Nous rapportons le cas d’une patiente traitée par immunothérapie et ayant présenté une réponse partielle dans un essai clinique de phase précoce (association d’immunothérapies anti-PD-1 et inhibiteur d’IDO). Cette patiente a également  présenté une réaction d’hypersensibilité médicamenteuse grave de type IV, appelé  DRESS  syndrome  (drug reaction  with eosinophilia  and  systemic symptoms). L’éruption cu­tanée érythémateuse et prurigineuse, ainsi que l’hyper-éosinophilie étaient au premier plan. Cet événement immunologique a nécessité l’interruption définitive du traitement.

Mécanismes de résistance aux inhibiteurs de checkpoint guidant le développement de thérapies innovantes en immunothérapie

Le développement des immunothérapies a changé le paysage thérapeutique de l’oncologie médicale. Les traitements par anticorps anti-PD-1/PD-L1 sont devenus des piliers dans la prise en charge de patients atteints de nombreux types tumoraux . Cependant, si certains patients présentent une réponse objective et une survie prolongée, on peut observer chez une grande majorité des patients, une rechute après réponse initiale, suggérant l’acquisition d’une résistance secondaire ou l’absence  totale  de réponse  au traitement chez les patients présentant une résistance primaire aux immunothérapies. La compréhension de ces mé­canismes de résistance est donc primordiale afin de choisir la stratégie thérapeutique la plus adaptée pour chaque patient et d’identifier  de nouvelles  cibles de traitement.  Parmi les principaux  mécanismes identifiés à  ce  jour, on trouve  l’absence  d’immunogénicité tumorale,  due  à  la perte  des néoantigènes  ou  des capacités de présentation antigénique, des altérations épigénétiques, la modification du métabolisme tumoral et son impact sur le fonctionnement des cellules du système immunitaire, la mise en jeu d’autres molécules de costimulation inhibitrices ou de la voie adénosine phosphate, et une implication forte du microenvironnement tumoral. Nous avons choisi de développer plus amplement ceux qui nous semblent soutenir les pistes de recherche thérapeutique les plus prometteuses.

Inhibiteurs de checkpoints immunologiques dans les carcinomes sarcomatoïdes de la vessie

Le carcinome sarcomatoïde de la vessie  [CSV]  est  un variant  histologique  rare  des cancers  de la vessie. Il  est particulièrement agressif avec un pronostic plus sombre que les carcinomes urothéliaux. L’efficacité des chimiothérapies habituellement utilisées  semble  moins  bonne  et  les  alternatives  thérapeutiques  sont  limi­tées. Les inhibiteurs de checkpoints immunologiques [CPI]. et notamment le pembrolizumab, ont démontré un intérêt en 2e ligne de traitement  dans les cancers de la vessie, avec un bénéfice en survie globale . Aucune donnée n’est disponible sur l ‘efficacité des anti-PD-1/PD-L1 dans les CSV. Néanmoins , cette entité  histolo­gique a aussi été décrite  dans  d’autres  types  tumoraux  [poumon,  rein] avec  des réponses  sous  CPI.  Dans cet article, nous rapportons le premier cas d’un patient avec un CSV traité  par  pembrolizumab,  avec  une réponse rapide et prolongée.

L’immuno-virothérapie oncolytique, une stratégie émergente de traitement du cancer

L’immuno-virothérapie oncolytique consiste à utiliser des virus réplicatifs pour cibler les cellules tumorales, provoquer leur lyse sélective, et activer ainsi la réponse immunitaire anti-tumorale. Cette approche, dont le concept est relativement ancien, est devenue une réalité thérapeutique depuis 2015 avec la mise sur le marché d’un premier produit, le T-Vec, pour le traitement du mélanome métastatique. Dans cette revue, nous rappelons le principe de la thérapie oncolytique et ses effets positifs sur la réponse immunitaire anti­-tumorale. Les mécanismes mis en jeu justifient notamment leur utilisation en combinaison des inhibiteurs de points de contrôle immunitaire. En parallèle des nombreuses avancées précliniques, le développement clinique est très actif. On dénombre une cinquantaine d’essais de phases I à II en cours dans une grande variété d’indications, de voies d’administration et de combinaison. Nous faisons le pari que cette classe émergente multifonctionnelle, qui permet de reprogrammer le microenvironnement tumoral (de convertir les tumeurs « froides » en tumeurs « chaudes ») pourrait devenir assez rapidement une nouvelle arme précieuse dans l’arsenal thérapeutique de l’oncologue.

Utilisation de lymphocytes T associés aux muqueuses comme cellules universelles portant un récepteur antigénique chimérique pour cibler des leucémies en contexte allogénique

L’efficacité des lymphocytes T autologues porteurs d’un récepteur antigénique chimérique (CAR) dans le traitement des hémopathies malignes réfractaires incite à développer des approches allogéniques afin de raccourcir le délai  de  production, d’améliorer la qualité des produits et de  diminuer les coûts. Afin d’éviter le risque d’allo-réactivité et de GvHD lié au TCR endogène des lymphocytes T, l’utilisation d’autres effecteurs lymphocytaires est envisagée. Les lymphocytes T invariants associés aux muqueuses  (MAIT) représentent jusqu’à 10 % des lymphocytes circulants de l ‘adulte et possèdent de puissantes  capacités  effectrices  asso­ciées à un faible potentiel allo-réactif lié à  leur  TCR  semi-variant. Leur  utilisation comme effecteurs uni­versels portant un récepteur antigénique chimérique en contexte allogénique semble donc  possible. Pour faire la preuve de ce concept, des cellules CAR-MAIT de 2génération exprimant un récepteur anti-CD19 seront comparées aux CAR-TCD19 autologues classiques utilisés actuellement. Leur capacité d’élimination des cellules leucémiques CD19 in vitro sera analysée. La  caractérisation de  l’efficacité  anti-tumorale  in vivo sera effectuée après injection de CD19 CAR-MAIT dans des modèles murins précliniques, en vérifiant  l’ab­sence de toxicité  de  type  maladie  du  greffon  contre  l’hôte  ou  effet  « off-tumor ». L’interaction  entre le CAR et le TCR endogène sera également étudiée. Ce travail devrait permettre de déterminer si les CD19 CAR-MAIT sont une source envisageable de cellules universelles « prêtes à l’emploi  »  pour  une immunothérapie adoptive en contexte allogénique.

Biomarqueurs de l’immunothérapie

Les immunothérapies basées sur l’utilisation d’inhibiteurs des points de contrôles immunitaires se sont révélées être une approche très prometteuse pour le traitement des patients atteints de différents cancers. Les immunomodulateurs les plus utilisés en clinique et validés par de nombreuses études sont les anticorps thérapeutiques anti-CTLA-4 (cytotoxic T-lymphocyte antigen 4) et ceux ciblant l’axe PD-1/PD-L1, comme les anti-PD-1 (programmed death-1) ou les anti-PD-L1 (programmed death-ligand 1). Ces traitements ont l’AMM dans plusieurs indications en cancérologie notamment pour les mélanomes, les carcinomes pulmonaires non à petites cellules, les carcinomes du rein, ORL et de la vessie, et les lymphomes de Hodgkin. Cependant, la proportion de patients répondeurs reste limitée, et dans le cancer du poumon la présence de biomarqueurs peut être requise pour la prescription de certaines molécules. L’identification de biomarqueurs prédictifs est ainsi devenue une priorité pour mieux cibler la prescription de ces molécules, car il s’agit de traitement coûteux avec des effets secondaires parfois sévères, sans compter les phénomènes d’hyper-progression décrits chez certains patients. Parmi les biomarqueurs les mieux décrits, il existe l’expression de PD-L1 par les cellules tumorales et/ou immunitaires, évaluée par immunohistochimie, mais aussi la charge mutation­nelle et la signature interféron. D’autres marqueurs sont liés à l’individu, comme les maladies chroniques inflammatoires (BPCO) et le microbiote. Cette revue résume les principaux biomarqueurs actuellement décrits et validés par des essais thérapeutiques. Ils peuvent être liés aux cellules tumorales, à l’environne­ment immunitaire ou à l’individu.

Impact du microbiote sur l’efficacité des immunothérapies

Le développement des immunothérapies a révolutionné la prise en charge des patients atteints de cancer. Après la mise sur le marché de l’ipilimumab, le premier anti-CTLA-4, une deuxième génération d’inhibiteurs de checkpoints a vu le jour avec les anti-PD-1 et anti-PD-L1. Ces anticorps monoclonaux permettent de restaurer la réponse lymphocytaire anti-cancéreuse jusqu’alors bloquée dans l’environnement tumoral par la liaison de PD-1 à son ligand PD-L1. Les recherches sur le microbiote intestinal se sont accélérées dans les dernières années permettant de prouver un lien avec l’immunité. Les bactéries commensales interagis­sent avec le système immunitaire intestinal et systémique en modulant les réponses immunitaires. La composition de la flore intestinale interagit avec la réponse immune naturelle contre le cancer et l’efficacité des inhibiteurs de checkpoints. La prise d’antibiotiques à large spectre causant une dysbiose réduit signifi­cativement la survie sans progression et la survie globale des patients sous immunothérapie. Des trans­plantations fécales de patients répondeurs à l’immunothérapie ont été effectuées sur des souris axéniques. Ces souris ont été sensibilisées au traitement ultérieur par inhibiteur de checkpoint. En recherche clinique, chez les non-répondeurs, l’alpha diversité du microbiote est plus faible que chez les répondeurs. Des sou­ches bactériennes considérées comme favorisant la bonne réponse aux anti-PD-1 ont été isolées. Les sou­ches les plus retrouvées dans la littérature sont Bifidobacterium et Akkermansia muciniphila. Des études restent à mener pour identifier de façon fiable les liens entre immunothérapies et bactéries commensales afin de proposer des applications thérapeutiques.